mardi 17 janvier 2012

Informations privées et réseaux sociaux

Cet article s’adresse principalement aux intervenants, mais contient des informations qui seront intéressantes pour tous.

Lorsque nous donnons une formation dans le cadre du projet Réseautage 2.0, il est convenu que les intervenants que l’on forme retransmettent le contenu qu’on leur fournit dans une forme qui convient à leur milieu de travail et leur clientèle. Pour enseigner un contenu, il est important de se l’approprier, voire de le maîtriser. Ceci veut dire que vous devrez utiliser les médias sociaux vous aussi.

Ce n’est pas tout le monde qui veut avoir un profil sur des réseaux sociaux. Plusieurs personnes, autant les intervenants que les chercheurs d’emploi, hésitent à s’engager dans l’apprentissage des médias sociaux par peur qu’on ne prenne avantage d’eux et de leurs informations personnelles. Il est normal et prudent d'avoir cette peur.


En même temps, il est primordial que les chercheurs d’emploi aient un accès aux compétences et aux ressources importantes pour leur recherche d’emploi. Nous avons suffisament insisté sur cet enjeu ailleurs.

Même si on vous encourage tous fortement à apprivoiser les médias sociaux, on sait qu’il est du droit de chacun de protéger son information privée de la manière qui lui convient le plus, incluant en s’abstenant de la partager sur les réseaux sociaux. Si la décision finale revient à chaque individu de choisir ce qu’il préfère, nous voulons nous assurer que vous avez considéré un certain nombre de points d’information importants.


A. Les enjeux de protection de votre information:
De Quoi S’Agit-il?

1. La collecte d’information sur les individus (data-mining).

Les sites de réseautage social collectent de l’information à votre sujet. C’est vrai. C’est aussi très peu épeurant en soi, considérant que c’est vous qui déciderez si vous la fournissez ou non dans la majorité des cas. De quelle manière Facebook, Twitter et LinkedIn collectent-ils de l’information à votre sujet?



D’abord, par l’information que vous leur transmettez en remplissant votre profil. Par exemple, en indiquant la ville où vous demeurez, ou une école que vous avez fréquenté.

Deuxièmement, lorsque vous autorisez un tiers parti qui détient des informations à votre sujet de les partager, comme votre fournisseur de service de messagerie (courriel), ou un autre fournisseur de service de média social. Un tiers parti est une personne ou une organisation autre que vous (premier parti) et le réseau social qui vous fournit un service (deuxième parti). Un exemple serait lorsque vous autorisez à Facebook  d’accéder à votre compte Twitter, ou vice-versa.

Troisièmement, en documentant comment vous utilisez le service qu’ils vous fournissent, en surveillant vos allées et venues (avec qui parlez-vous le plus, quelles pages consultez-vous le plus souvent, quels sujets vous intéressent, etc.). Si vous rejoignez le groupe Réseautage 2.0 sur Facebook, le site a une méthode grâce à laquelle il déterminera que vous vous intéressez à l’employabilité et au réseautage.

Finalement, si vous demeurez connectés à un réseau social et que vous consultez simultanément d’autres sites web, et que ceux-cis emploient des « modules sociaux » de ce réseau social, ils se peut qu’ils partagent des informations avec le fournisseur de service de votre réseau social (à quel moment vous avez consulté le site, pour combien te temps, etc.). Vous savez que vous faites affaire à un module social lorsque vous voyez un bouton Facebook ou Twitter sur un autre site que Facebook ou Twitter, par exemple.

2. Pourquoi les sites de réseautage social collectent-ils des données au sujet de leurs utilisateurs?

Il est tout a fait légitime et normal de se poser cette question. D’abord, parce qu’un profil d’un réseau social  n’est rien de plus que ce genre d’information à notre sujet que l’on partage avec d’autres utilisateurs (suiveurs, amis, connexions) par l'intermédiaire d'un service qui les collecte (Twitter, Facebook, Linkedin). Votre nom (ou nom d’utilisateur), la ville où vous êtes, votre profession, ce dont vous voulez parler, etc. Une certaine quantité d’information de base doit donc nécessairement être collectée pour le fonctionnement du service.

Deuxièmement, parce que les réseaux sociaux sont parfois plus intéressants quand ils sont adaptés à l’utilisateur. C’est en collectant cette information à votre sujet que des suggestions personnalisées vous seront faites. Par exemple, une personne qui a plus de cinq ou six amis en commun avec vous sera suggérée comme ami, car c'est probablement quelqu'un avec qui vous seriez intéressé de réseauter ou que vous connaissez déjà. Si vous lisez énormément d’articles concernant des groupes de musique rock, par exemple, un site peut aussi très bien vous proposer de consulter un compte dédié à ce sujet.

Troisièmement, et c’est pour plusieurs la principale raison, parce que les revenus de ces sites, qui fournissent tout à fait gratuitement des services extrêmement sophistiqués, proviennent principalement de publicités. Les publicités sur les réseaux sociaux (tout comme sur Google d’ailleurs) sont ciblées pour le type d’utilisation que vous faîtes d’Internet. Les publicités pour des abonnements à des magasines ou des journaux seront ciblées spécifiquement aux gens qui lisent beaucoup d’articles, et les publicités pour des albums de musique aux gens qui écoutent beaucoup de musique sur Internet. Ainsi, des données seront recueillies à votre sujet pour vous cibler avec des publicités de produits et de services qui risquent de vous intéresser, plutôt que pour des services et produits qui risquent d’avoir très peu d’intérêt pour vous. Tout le monde qui utilise ces réseaux sera exposé à des publicités, qu’ils partagent peu ou beaucoup d’information. De plus, nous vous recommandons généralement d’ignorer les publicités lorsque vous utilisez les réseaux sociaux. Ce genre d’utilisation de vos données de profil est donc relativement sans impact sur votre intimité.


3. Le partage d’information avec des tiers partis et l’utilisation de votre image dans les publicités sociales.

Les sites de réseautage social ont diverses politiques concernant le partage de vos informations avec des tiers partis. Plusieurs personnes ont peur que Facebook partage des données les concernant à ces tiers. Cela est pourtant très peu probable. C’est d’abord extrêmement difficile de voir pourquoi les têtes pensantes de Facebook pourraient vouloir faire cela. Leur gagne-pain, c'est justement leur accès privilégié et inégalé à cette information: tant qu’ils ne la divulgent pas, il n’y a qu’eux qui peuvent vendre leur service d’annonces ciblées spécialement pour leurs utilisateurs individuels. C’est d’ailleurs précisé dans leur politique de confidentialité qu’ils ne partageront pas cette information sans votre consentement. C’est d’ailleurs très important pour cette raison de bien réviser tous vos paramètres de confidentialité et vos paramètres de compte.

Deuxièmement, il y a des enjeux légaux. Si un mandat de perquisition est émis par une authorité judiciaire pour la saisie d’information contenu dans les comptes de réseautage sociale d’une personne, il est possible que Facebook ou Twitter donne un accès à la police pour des fins d’investigation. Twitter avertira ses utilisateurs qu’ils sont sous surveillance, mais Facebook ne le fera pas. Dans tout les cas, il est mieux de considérer que tout ce que l’on publie sur un réseau social est considéré comme public au sens de la loi, et de s’abstenir d’y partager des informations qui pourraient nous nuire.

Finalement, il est toujours possible pour des pirates informatiques (hackers) de voler de l’information à votre insu (sans votre consentement ni celui du fournisseur du service que vous utilisez). Il n’existe rien de parfaitement sécuritaire sur Internet, ni dans la vie en général d'ailleurs, et les sites de réseautage social ont leurs lot de bogues et problèmes de sécurité comme tout les autres. Plusieurs recours légaux ont lieu présentement pour tenter de forcer Facebook et d’autres compagnies fournissant des services de médias sociaux de mieux protéger les données de leurs clients. Règle générale, les données sont de mieux en mieux protégées, mais peut-être pas à un rythme qui plaît à tout le monde.

B. Options pour un apprentissage sécuritaire.
Si vous êtes incertains de vouloir utiliser à des fins personnelles un des réseaux sociaux que nous vous présentons, même avec toutes les possibilités pour vous de modérer la quantité d’information personnelle que vous partagez, il est définitivement possible pour vous d’apprendre à utiliser les médias sociaux tout en partageant un minimum d’information personnelle (virtuellement aucune).



Je dois par contre insister que certaines de ces options ne sont qu'un dernier recours, puisqu’elles vous demandent, dans le cas où vous serez vous aussi intéressés à vous créer des profils sur les réseaux sociaux, de tout faire en double.

Ce que vous pourriez d’abord considérer, c’est de vous créer des comptes à votre nom dès le départ, tout en maintenant les paramètres de confidentialité les plus serrés que vous pouvez identifier, et en limitant la taille de votre réseau. Vous pourrez explorer le matériel que nous vous offrons et maîtriser l’interface de chaque site de réseautage social, mais beaucoup plus lentement que si vous vous en serviez vraiment.

La seconde option, c’est de créer des comptes corportatifs pour votre organisation. Un compte officiel Twitter, un profil de compagnie sur LinkedIn ainsi qu’une page sur Facebook peuvent tous êtres faits pour votre organisme sans que vous ne vous y engagiez sur le plan personnel. Vous aurez ainsi l’occasion de faire d’une pierre deux coups, en apprenant l’interface de ces services tout en donnant de la visibilité à votre organisation. Si vous comptez par contre opter pour cette solution, il vous faudra vous documenter sur les utilisations organisationnelles des médias sociaux afin d’éviter de faire des erreurs graves (un billet à ce sujet est en préparation et sera publié sur notre blogue).

Une troisième option, c’est de créer des comptes avec des pseudonymes, aucunement associés avec votre nom, votre organisation ou votre personne. Ces comptes vous permettront d’explorer l’interface du service tout en éliminant le risque de faire des gaffes qui pourraient nuire à votre image ou à celle de votre organisation. Bien sûr, si vous vous découvrez un intérêt pour les médias sociaux et surmontez votre peur, il vous sera alors possible d’arrêter d’utiliser ces pseudonymes, supprimer les comptes bidons que vous aurez créé, et vous créer de vrais comptes.

C. Conclusions.
Les enjeux de confidentialité, de vie privée et le contrôle de vos informations sont des enjeux d’actualité extrêmement importants, autant pour votre utilisation d’Internet que pour la société contemporaine. C’est important de s’en tenir informé, de se former une opinion et de l’exprimer, ainsi que de se mobiliser pour faire changer les pratiques quand elles ne nous conviennent pas. Plusieurs projets de loi au Canada, aux États-Unis et ailleurs dans le monde pourront faire pencher la balance du côté des corporations, du gouvernement ou des individus dans le futur proche. Certains réseaux sociaux, comme Path ou Diaspora, sont notamment plus respectueux de la vie privée de leurs utilisateurs que Facebook ne l’est. Par contre, leurs applications au niveau de l’employabilité est restreinte, et leur base d’utilisateurs est beaucoup plus restreinte, constituée principalement de technophiles info-compétents pour qui il est facile de jongler plusieurs réseaux sociaux. Facebook a un passé plus entaché par des problèmes de confidentialité, comparé à Twitter et LinkedIn. Si vous préférez vous en abstenir et n’enseigner que Twitter et LinkedIn à vos participants, vous leur rendrez définitivement service quand même. Mais vous saurez encore mieux les aider si vous pouvez leur enseigner à gérer leurs paramètres de confidentialité et leurs paramètres de compte sur Facebook.

Meilleures pratiques.
Nous recommandons à tous les utilisateurs de suivre certains principes généraux dans le partage d’information personnelle sur Internet.
  • D’abord, de s’abstenir le plus possible de partager des informations pouvant être utilisées facilement pour l’usurpation d’identité: adresse civique, code postal, date de naissance, numéros de pièces d’identité (Assurance sociale, passeport, permis de conduire, pièces d’identités gouvernementales), numéros de téléphone, numéros de carte de crédit ou de compte en banque, etc.
  • Ensuite, de lire attentivement les politiques de confidentialité des services que vous voulez employer, et de réviser les paramètres de confidentialité et les paramètres de compte correspondants pour choisir le degré de votre engagement dans le partage d’information.
  • Troisièmement, de réfléchir attentivement à chaque fois que vous partagez une information privée, personnelle, confidentielle ou délicate sur Internet, ou que vous participez à un échange qui peut être licenciux, polémique ou controversé.
  • Quatrièmement, de toujours naviguer en mode HTTPS (plutôt que http) lorsque cette option est disponible, notamment sur Facebook et Twitter.
  • Cinquièmement, d’installer un anti-virus sur votre ordinateur (pas nécessaire si vous êtes avec Linux). Certains sont gratuits (AVG, AVAST).
  • Sixièmement, de choisir des mots de passe sécuritaires (les plus longs possibles).
  • De plus, vous pouvez limiter la capacité des modules sociaux des sites de saisir votre information en boquant les cookies ou en installant des plug-ins sur votre navigateur.
  • Finalement, de vous déconnecter (déconnexion, quitter, log out, sign out, etc.) de tout service protégé par un mot de passe dès que vous avez cessé de l’employer.

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